5 choses à (sa)voir sur l’îlet Chancel du Robert en Martinique

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Caraïbe,Découverte,Martinique,Nature

Bel bonjour cher colibri,

Pour cet été…ou plutôt ces grandes vacances (car aux Antilles, il n’y a pas d’été 😉), je suis rentrée en Martinique pour recharger mes batteries auprès de mes proches après un an et demi sans les voir. Cela fait un bien fou !

Bien sûr, j’en profite, comme je le fais chaque fois que je viens en vacances, pour explorer de nouvelles pépites. Mercredi dernier, je suis partie du côté de la commune du Robert pour une journée sur les ilets.

Le temps un peu couvert de début de journée – oui…quelques jours auparavant, nous avions essuyé une jolie tempête 😲 –  a laissé place à un ciel bleu et un soleil perçant, quoique doux, durant le reste de l’escapade. Nous étions 8 passagers à bord de notre embarcation et j’étais la seule native, ce qui m’a un peu attirée l’attention…mais nous y reviendrons. Notre skipper, très sympathique, nous a fait un petit topo sur les gestes à avoir en mer, tant pour notre propre sécurité que celle des écosystèmes que nous allions observer. Il a su nous mettre à l’aise, tant et si bien qu’il nous a autorisés à manœuvrer le bateau. Au programme, navigation au milieu des différents îlets, halte à l’ilet Madame pour une petite baignade, un peu de snorkeling, un petit apéro et un bon déjeuner cuisiné avec amour par une locale. Puis retour sur le bateau pour faire cap sur l’ilet Chancel où nous allions recevoir un petit cours d’histoire et de biologie.

Je fus agréablement surprise par cette partie de l’excursion car bien qu’étant la seule native, je me suis rendue compte qu’il y avait pas mal de choses que j’ignorais ! Comme quoi, il n’est jamais trop tard pour en apprendre sur son île natale 😆 !

Après cette longue introduction, voici 5  des choses que j’ai retenues de cette visite sur l’îlet Chancel.

1 – L’îlet Chancel, ancienne habitation sucrière

L’îlet Chancel, de ses 2 km sur 0,9 km, est le plus grand îlet de la MartiniqueAnciennement îlet de Monsieur, il fut renommé îlet Ramville après son acquisition par Dubuc de Ramville. Depuis son rachat en 1891 par M. Lagrange-Chancel, il est nommé îlet Chancel. Il garde les vestiges d’une habitation sucrière, détruite lors de cyclone. L’habitation de l’îlet Chancel était l’une des seules habitations martiniquaises qui regroupaient au 18e siècle une triple activité : habitation sucrière, chauffournerie et poterie. Le site de la poterie s’étend en bord de mer, sur le côté ouest de l’îlet. De très nombreux vestiges de murs, canalisation et fours sont visibles.

Avec une situation géographique privilégiée aux alizés, il constitue un refuge pour les grands oiseaux migrateurs et marins comme l’Aigle Pêcheur ou Aiglon. Son faible éloignement de la côte martiniquaise en fait aussi un refuge, non seulement pour les Chauves-souris, mais surtout pour l’Iguane endémique des Petites Antilles (Iguana delicatissima), qui est en voie d’extinction dans toutes les Petites Antilles, qui ne se trouve plus que dans les forêts de Prêcheur, de Grand Rivière et dans les forêts du Morne Jacob.et qui sur l’îlet, a une population de plusieurs centaines d’individus. La végétation est actuellement constituée essentiellement de Poiriers (Tabebuia heterophylla) et de Mancenilliers.

2 – Refuge des iguanes endémiques des petites Antilles

L’iguane des Petites Antilles, appelé localement iguane péyi (Iguana delicatissima) est une espèce en danger critique d’extinction (UICN), protégée et endémique des Petites Antilles. Du fait de son importante valeur écologique et patrimoniale, cet iguane fait l’objet d’un Plan National d’Actions (PNA) dont les objectifs sont l’amélioration des connaissances sur l’espèce, la sensibilisation à sa protection et la mise en place d’actions de conservation.

L’iguane commun, appelé localement iguane rayé (Iguana iguana) a été introduit par l’homme depuis la Guyane, jusque sur les îles de l’archipel Guadeloupéen à la fin du XIXème siècle, puis en Martinique dans les années 1960. A l’heure actuelle, il reste de loin la principale menace pour la survie à long terme de l’iguane des petites Antilles et est à l’origine de nombreux dommages sur le territoire. C’est pourquoi il a été classé en tant qu’Espèce Exotique Envahissante et fait l’objet d’un Plan de Lutte afin que ses populations soient régulées.

Les différences entre ces deux espèces sont tant génétiques que morphologiques. Malgré cela, les deux espèces peuvent s’hybrider et leur descendance est fertile, ce qui conduit à une dominance du pool génétique de l’iguane commun et à l’accélération de la disparition de l’iguane péyi. Il est donc primordial de savoir les différencier.

3 – Vestige d’une chauffournerie

Le site est encadré par deux fours à chaux importants, construits près de la mer afin de faciliter leur alimentation et de pouvoir éteindre la chaux lorsqu’elle était cuite. Celui de l’ouest présente un escalier circulaire permettant l’accès à la gueule du four où l’on chargeait le calcaire et le combustible. Celui de l’est, de forme quadrangulaire, conserve une rampe en bon état. Les fours à chaux produisaient la chaux nécessaire à la préparation du sucre et à la construction. La chaux était obtenue en brûlant les coquillages et les coraux nombreux autour de l’îlet.

En Martinique la chaux, matière miracle, était vitale pour l’économie balbutiante de la colonie. Intrant efficace, elle est utilisée sur les premières parcelles exploitées. Pour le bâti, elle permet de créer des mortiers et enduits, majeur pour la sédentarisation de la future société. Plus loin tard, elle devient incontournable dans la fabrication du sucre, activité primordiale de ce nouveau joyau de l’outre-mer royal. Directement construits sur les habitations, les fours à chaux en accompagnent le développement initial. À partir du XVIIIe siècle, la production se concentre sur des implantations dédiées, les chauffourneries.

Je t’invite à faire cette visite pour entendre une version un peu plus…sombre de l’utilisation de la chaux à l’époque.

4 – Le Zamana

Bon nombre d’entre nous ont déjà vu (ou entendu parler) de l’époustouflant Zamana de l’habitation Céron dans la commune du Prêcheur. Et pour cause, cet arbre âgé de plus de 300 ans a été élu plus bel arbre de France en 2016. Eh bien, on en trouve également un sur l’îlet Chancel ! Le zamana du parc de l’Habitation Céron (une ancienne exploitation sucrière créée au XVIIe siècle), est répertorié comme étant l’un des plus gros arbres des petites Antilles. Un arbre protecteur qui bénéficie d’une indulgence de la part des éléments : il a survécu à tous les cyclones ainsi qu’à l’éruption volcanique mortelle de la montagne Pelée en 1902. Le zamana, ou arbre à pluie, servait autrefois à abriter les plantations de caféiers et de cacaoyers. Par mauvais temps, ses feuilles se referment pour laisser l’eau de pluie s’infiltrer dans le sol et irriguer ses racines (un si grand arbre en a besoin d’eau!). A l’inverse, lorsque le soleil chauffe, le feuillage de l’arbre forme une barrière naturelle contre les rayons, permettant au sol d’être à l’ombre et de garder son humidité. Il en profite pour capter la lumière. La nature est bien faite quand même !

Fun fact : Il faut presque 10 personnes se tenant la main pour faire le tour de son solide tronc de plus de 2,50m de diamètre.

5 – Le figuier maudit

Un autre spécimen pour le moins original se retrouve sur l’îlet Chancel : le figuier maudit.

Le figuier maudit est un Ficus citrifolia. (Ficus est le nom latin pour figue, le Ficus est le genre ; la famille est Moraceae. Il existe 750 espèces de Ficus dans le règne botanique, le figuier maudit en est un parmi d’autres). C’est un des figuiers étrangleurs (nom vernaculaire c’est à dire donné à un ensemble d’espèces). Si l’on dit de ce figuier qu’il est étrangleur, c’est pour une bonne raison : son système de développement étouffant. En effet, le figuier étrangleur à tendance à étouffer d’autres arbres pour grandir et s’en nourrir. Il les emprisonne jusqu’à ce qu’ils meurent, pourrissent et produisent un humus qui servira à nourrir sa propre croissance. En Martinique, le figuier maudit est à la fois considéré comme magique, et maléfique. Magique car :

  • il nourrit : les premiers colons se nourrissaient à l’époque de son fruit comestible.
  • il est utile : son latex était utilisé pour faire des chewing-gum et ses racines aériennes pour faire des fouets, des cordes d’arcs ou encore des lignes de pêche solides. Enfin, ses fruits ont été utilisés pour des teintures.
  • il soigne : en médecine traditionnelle, il est utilisé comme antiparasitaire et laxatif. En médecine moderne, il diminue les effets des chimiothérapie contre les cancers.
  • il inspire : les emplacements de figuiers maudits en Martinique sont des lieux choisis de grands événements en Martinique. Chaque commune de Martinique possède son grand figuier maudit et chaque histoire des communes pourraient raconter un événement qui s’y est passé à proximité.

Maléfique car :

  • dans la Bible, il a été maudit par Jésus
  • il peut pousser à l’intérieur de murs
  • il est la matière première d’une recette vaudou
  • d’étranges choses se passeraient près d’un figuier maudit. Lorsqu’un martiniquais se promène à la tombée de la nuit, il s’éloignera toujours des arbres dit fromager et des figuiers maudit. On dit qu’au coeur de ces troncs plus ou moins creux se trouvent des esprits cachés près à vous happés si vous passez trop près d’eux …

Voilà ! Nous avons bien sûr vu pleins d’autres choses lors de notre visite mais je ne pourrais pas parler de tout en un article. Tu sais ce qu’il te reste à faire 😉.

D’ailleurs, si je te disais que cette excursion était faisable en bateau éco-responsable, serait-ce pour toi un argument de plus pour la faire ?

Dis-le moi en commentaire …

A très bientôt,

Lina

📚

http://www.martinique.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/FICHE25_cle24dc5b.pdf

http://www.martinique.developpement-durable.gouv.fr/iguanes-a1417.html

https://www.ticanots.com/blog/photos/four-a-chaux-restaure_gp3526695.html

https://www.treeoftheyear.org/Previous-Years/2017/Albizie-v-Ceronskem-parku?lang=fr-FR

https://www.sugarcanelane.com/martinique-distilleries/martinique-habitations-visites-insolites/habitation-ceron/

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2 réponses

  1. Il y a des robertins qui disent « Le Robert, ville capitale »… Cest vrai qu’il y a de belles choses mais ils sont un peu dans l’abus. 😁

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